Moi, non plus, je te condamne pas

Récit de la femme adultère (Jean 8,1-11)

La liturgie du dimanche 3 Avril, nous propose de méditer ce beau récit. D’entrée de jeu, Jésus est présenté en position d’enseignant, c’est-à-dire interprétant la Loi.

La liturgie du dimanche 3 Avril, nous propose de méditer ce beau récit. L’introduction de ce passage, appelé « Récit de la femme adultère », commence par une notation à laquelle nous ne faisons pas toujours attention : d’entrée de jeu, Jésus est présenté en position d’enseignant, c’est-à-dire interprétant la Loi. Et précisément c’est sur cette qualité de Maître qu’on s’adresse à lui.

Jésus et la femme adultère par Cranach l'Ancien, 1532

Apparemment, il s’agit du procès d’une femme prise en flagrant délit d’adultère qu’on amène à Jésus. On peut quand même se poser les questions : Pourquoi est-elle seule ? Où se cache son compagnon ? Ou bien l’a-t-on, par complicité, laissé partir ?

Mais derrière ce qui semble être le procès principal, n’y en a-t-il pas un autre plus insidieux, celui du Maître en question ? Tout le laisse entendre. Dès le point de départ, l’opposition entre Jésus et les scribes et pharisiens est visible : « Dans la Loi, Moïse nous a prescrit…. Et toi, que dis-tu ? ». Le piège est manifeste : si Jésus se range du côté de la loi de Moïse et est d’accord pour la lapidation, il va se heurter au pouvoir romain, et cette position va à l’encontre de son enseignement qui parle d’un Dieu de miséricorde ; mais s’il conteste cette lapidation, il s’oppose à la Loi de Moïse, autorité suprême pour les Juifs. En fait, Jésus n’est pas dans une meilleure posture que la femme adultère, il est aussi en danger de mort. Il ne faut pas oublier que nous sommes dans le contexte de la Passion et que son procès se profile déjà. Et l’occasion est trop belle pour ne pas la saisir et prendre Jésus au piège.

L’habile réponse de Jésus n’enferme pas dans la mort, mais est ouverture sur la vie. On pourrait dire que cet épisode illustre cette phrase des débuts de l’Évangile de Jean (3,17) : « Dieu n’a pas envoyé son fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé ».

Jésus et la femme adultère. Vitrail église St Pierre, Dreux

Jésus ne répond pas tout de suite, comme s’il voulait laisser à chacun le temps de la réflexion, ne cherchant pas à mettre ses interlocuteurs dans une fâcheuse position. Les scribes et les pharisiens persistant dans leur questionnement, Jésus les renvoie à leur propre condition de pécheurs, face à cette Loi qu’ils brandissent : « Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette la 1re pierre ! »

Arrêtons-nous un peu sur le fait que Jésus se baisse deux fois et écrit sur la terre. On peut alors se demander pourquoi Jésus se baisse ; cela nous renvoie - en St Jean - à la scène du lavement des pieds : rapprochement éloquent ! Un autre passage du même évangéliste montre Jésus qui travaille avec la terre : la guérison de l’aveugle-né : « Il cracha par terre et fit de la boue avec sa salive. Puis il appliqua cette boue sur les yeux [de l’aveugle] » (Jn 9, 6). On pourrait y voir une relation avec le re-modeler, le re-créer.

« Va, ne pèche plus ! » Bernadette Lopez, Evangile et Peinture

Pour finir, regardons le dernier verset : « Moi, non plus, je ne te condamne pas ! Va et ne pêche plus ! » Pour cette femme dont l’enjeu est de savoir si elle va être lapidée ou pas, le “Je ne te condamne pas” résonne sûrement comme une prodigieuse libération.

Va et ne pèche plus ! Jésus lui dit “Va”, c’est-à-dire qu’il lui ouvre un chemin de liberté.

Sr Gabrielle H., SCR

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