Michelle et Claudine habitent au 14e étage d’une tour du Blosne, au sud de Rennes. Elles nous partagent quelques moments particuliers de rencontres vécus au cours de cet été…
- Pouvoir se réjouir avec la famille d’Aïcha :

Claudine : Samedi 8 Août, en rentrant dans notre tour, nous remarquons beaucoup d’hommes en tenue de fête ainsi que quelques femmes au pied de la tour. En attendant l’ascenseur, nous complimentons celles-ci sur leurs belles tenues et leur souhaitons une bonne fête. J’entame une discussion avec l’une d’elles qui me dit que la fête se passe au 1101 de la tour.
- « Alors, c’est chez Aïcha ? Mais nous nous connaissons ! » m’écriai-je. L’interlocutrice m’explique alors qu’il s’agit de la préparation du mariage de la fille d’Aïcha, c’est aujourd’hui la rencontre des deux familles.
- « Vous allez venir avec moi, c’est très gentil d’avoir ainsi des relations » dit-elle. Quelques minutes après, Michelle et moi nous nous présentons à l’appartement 1101. Cette même femme nous accueille et nous présente les personnes assises dans le couloir et un peu partout dans l’appartement. Elle nous conduit voir la future mariée qui est dans sa chambre avec ses cousines. Nous offrons nos félicitations. Ces femmes, ce sont des tantes, de la famille proche. Aïcha - par contre - n’est pas là, ni les autres enfants. La femme nous dit :
- « Je suis la sœur d’Aïcha, je viens de Mayotte, et c’est pour cela que je peux vous introduire ». Des tantes nous présentent le tableau des bijoux qui sera offert à la future mariée tout à l’heure. Tous viennent de Mayotte ou de Marseille, leur origine étant les îles Comores. Avant de sortir, nous saluons le futur marié qui se prépare pour la circonstance et lui offrons nos vœux. Quelle surprise de voir tant de personnes dans un si petit T4 ! A tous, nous souhaitons une bonne fête avant de les quitter. Nous avons vu qu’ils étaient très heureux que nous participions ainsi à leur joie.
Le lendemain matin, le 9 août, nous partons à la messe. A la porte, un homme que nous saluons nous reconnaît. Il nous dit que la fête s’est très bien passée et nous remercie de nous être réjouies avec eux de ce moment de fête. « Nous repartons aujourd’hui à Marseille, demain il y a le travail. » Cette rencontre a élargi notre prière au cours de la célébration.
- Une petite brèche qui s’ouvre :
Claudine : En juillet, je rencontre Paulette, habitante de la tour. Elle me partage “son fardeau”. Elle en porte si lourd ! Alors, je l’invite à venir prendre un café chez nous quand elle le pourra. Ça lui est difficile parce qu’elle est surveillée dans ses mouvements. « Je pourrai peut-être quand il dormira » dit-elle. Un soir, j’entends frapper très fort à la porte. C’est Paulette.
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« Est-ce que je peux venir demain matin ? Mon mari sera absent ».
- « D’accord, vous pouvez venir, je serai là ». Vers 10h, Paulette arrive, apportant une courgette. Elle accepte difficilement de s’asseoir… Enfin elle se met à raconter la tragédie de sa vie. Elle pleure, je n’ai aucun mot à dire, je suis là, présente, pour l’écouter. J’accueille cette vie douloureuse. Ce jour-là je l’ai prise plus en considération, j’ai mieux compris Paulette. Peut-être une lueur d’espérance a-t-elle jailli en elle, se sentant moins seule. Michelle et moi nous « portons » Paulette, son mari, toutes les difficultés qu’ils vivent et aussi celles de beaucoup d’autres autour de nous.
- Témoigner que chaque visage a du prix :

Michelle : Fin juillet, je m’en vais par les petits sentiers du quartier chercher ma voiture au garage. J’aperçois un vélo sur le sentier qui vient vers moi. Il s’arrête à ma hauteur :
- « Ah, c’est Béatrice ! »
- « Tu me reconnais ? »
- « Mais oui, sauf qu’avec les masques c’est plus difficile ».
- « Je t’ai vu sur la route et je me suis dit : En voilà une que je connais » (J’ai accompagné son équipe JOC - Jeunesse Ouvrière Catholique - voilà bien longtemps). Nous nous mettons à discuter, à nous raconter les nouvelles et le sujet du Covid-19 revient. « J’ai eu du mal à vivre ce temps là », dit-elle. « Tu vas rire, mais ce sont les câlins de ma mère qui m’ont manqués ». On a continué ensuite chacune son chemin. Puis, sur le sentier, je me suis trouvée face à un groupe de jeunes. Il faut que je passe au milieu du groupe. Je leur dis bonjour avec un sourire et je m’excuse de passer au milieu d’eux. Un des jeunes me dit :
- « Madame, auriez-vous mille euros à me donner ? »
– « Mon pauvre, mais ce n’est pas assez ! » Nous rions un bon coup ensemble et je continue mon chemin.
Toutes ces rencontres et bien d’autres semblables nous obligent à regarder la réalité telle qu’elle est et non pas comme nous la voudrions. Ces personnes, il faut que nous les accueillions avec la totalité de leur vie. C’est bien là que le Seigneur les attend et les accueille pour leur donner son salut. Notre place auprès d’eux, c’est simplement d’être là.
Michelle J. et Claudine H., SCR, Rennes