Septembre 2021. L’heure est venue pour Sœur Marie de faire ses adieux au Burkina, après 38 ans de présence :

« Avec simplicité, je veux essayer de partager avec vous la relecture que je fais de ces années.

A l’origine, en France, une phrase banale entendue, tombée comme une graine dans mon cœur : “Si on t’envoyait en Afrique…” . Je n’y avais jamais pensé, elle a germé pendant 3-4 mois. Étant en congés chez Maman, le dimanche de l’Épiphanie, l’homélie d’un missionnaire de passage fit tilt en moi : “Savoir partir pour vivre une certaine aventure comme les Mages, reconnaitre les étoiles comme signes dans nos vies”. Après un temps de partage dans le dialogue, avec ma Responsable, je fus envoyée au Burkina Faso en 1983, à Piéla. Je suis partie sans compétence spéciale. On m’avait dit : “En Afrique il faut savoir tout faire”. Et aussi “Il faut simplement dire aux personnes que Dieu les aime”. J’ai souvent pensé aux débuts de notre Congrégation : elle n’a pas été fondée pour un travail ou pour une œuvre.

Je me suis vite adaptée chez vous, à ce peuple burkinabè accueillant, souriant, simple. Je vois encore ces femmes venir puiser l’eau au puits devant chez nous, tout en tricotant ! Je me sentais à l’aise avec elles, balbutiant ces quelques mots : ag banu main a guan main tuont tuondi. Ah ! cette langue - malgré les leçons apprises avec mes sœurs - comme elle m’est restée difficile !!! Un jour une femme me dit : “Mais vous nous comprenez avec le cœur”. Cette parole me montrait la bonne façon de vivre avec les gens : être avec eux, pour eux et non pour moi.

Il me semble que ce que j’ai essayé de vivre, c’est le service de Marthe et l’attitude de Marie. Le service de Marthe : dans les différentes activités près des femmes (couture, à l’occasion soin de plaies, catéchèse, secrétariat, paroisse…) et, en dernier lieu, présence au milieu des novices. Le service de Marie : j’ai aimé ces moments privilégiés dans la prière auprès de Lui : aller à la source puiser la force pour vivre ma Foi et demeurer dans la confiance. Contemplation dans l’action.

Les mots du Pape François sur la Mission m’interpellent : “Celui qui part en mission, n’importe quelle mission, accomplit une œuvre belle, bonne, s’il possède un cœur qui se laisse modeler dans la patience, au rythme de la vie concrète et quotidienne, là où son action peut devenir féconde” :

• Me suis-je assez laissé modeler ? Pardon pour mes impatiences à travers mes paroles trop rapides ou mes gestes trop hâtifs sans savoir attendre ou laisser faire. Pardon pour mes manques de confiance, mes peurs, mes manques d’attention, d’encouragement, mon manque d’Espérance, tout ce qui n’a pas contribué à « aimer à la manière de Jésus dans l’Évangile ».
• Devenir féconde : cela ne m’appartient pas. Dieu seul sait ! Vous êtes aujourd’hui au nombre de 22 sœurs. C’est une joie pour moi d’avoir pu faire un bout de chemin avec vous, de vous avoir vu grandir. Merci de m’avoir donné de vivre avec vous l’expérience d’une autre culture que la mienne, d’y avoir appris la patience, la joie, de savoir prendre du temps pour l’écoute et pour vivre le dépouillement de soi pour l’autre. Je ne peux pas ne pas mentionner ici le temps de présence près de Sœur Odile, à l’hôpital…

Merci à vous les jeunes novices. En quittant Piéla, j’avais dit : “J’ai donné tout ce que j’avais à donner”. Sans doute que non, il me fallait passer encore par le noviciat du 21^e siècle en Afrique !!! Vous m’avez aidée à garder un cœur jeune. Merci pour votre jeunesse, le soutien de la prière, les chants. Merci pour les partages d’Évangile. Je vous souhaite que ce goût, ce désir d’Évangile vous reste au cœur pour bien vivre et marcher à la suite de Jésus. Bonne route à toutes !

Merci Seigneur, mon appui, mon guide, Tu m’as soutenue jour après jour ! »

Sœur Marie H., SCR